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Notre séjour auprès des agriculteurs du projet Pepital

Après avoir passé quatre jours au Sitio Escola à Alcântara (cf. article), nous sommes parties à la rencontre des agriculteurs du projet Pepital. Ces agriculteurs qui pratiquaient autrefois la "roça com fogo" ou agriculture sur brûlis, tentent une transition vers un système plus durable : la "roça sem fogo". Pour mieux comprendre le contexte nous vous invitons à lire notre article Le projet Pepital, projet de restauration participatif.


Ernesto, agronome bolivien réalisant un doctorat à l'UEMA, accompagne les agriculteurs vers cette transition pour tenter de sauver la rivière Pepital, mise en danger par la déforestation. Pour lui la question est la suivante : "comment accompagner les agriculteurs dans cette transition, comment leur transmettre ses connaissances techniques ?" Bien plus qu'un projet de reforestation, c'est amélioration du quotidien de ces personnes qui est en jeu. L'agriculture pratiquée jusque là ne leur permettait que de (sur)vivre, introduire une diversification de la production leur permettra peut être d'en tirer une rente.


C'est dans l'agrovilla[1] Espera, une des communautés créées pour les familles déplacées pour la construction la base spatiale, que nous avons rencontré Senhor Barroso, Argemiro et Alexandra. Paysans sensibles à la qualité de leur environnement, ils ont cessé de mettre feu à leur parcelles et ont intégré le projet Pepital. C'est toujours ensemble qu'ils vont travailler dans leurs parcelles respectives sous la forme de "mutirão" (chantier participatif).

 

Nous avons voulu vous faire le portrait de ces trois personnages atypiques


Senhor Barroso

Senhor Barroso, un monsieur plein de sagesse, de bonheur et d'entrain, nous a accueilli à bras ouverts. Ce dernier, très sensible à son environnement et attaché à sa forêt, est l'un des premiers à avoir intégré le projet Pepital, il y a 3 ans. Contrairement à Alexandra et Argemiro, il possède une parcelle entourée d'une forêt plus ancienne sur laquelle il n'a jamais voulu pratiquer l'agriculture sur brûlis. Comme il dit "c'est ici que je viens admirer la beauté de la nature". Sur la parcelle où il pratiquait autrefois le brûlis, se dressent de grands cocotiers Baçu, résistants aux feux. Tant de raisons qui font que sa terre est meilleure et que, des trois, il est le seul pour qui la "roça sem fogo" est un succès pour toutes les productions.


Barroso a intégré le projet dès le début suite à une visite organisée par Ernesto auprès d'agroforestiers dans le Maranhão : des agriculteurs "heureux et capables de payer des études à leur enfants"... L'idée lui plait et il se lance dans la "roça sem fogo". La première année, le débroussaillage se fait par le feu, on plante du manioc, des feijão et du maïs (les indétrônables) tout en couvrant le sol d'une couverture végétale sèche. La récolte a bien donné ! Prochaine étape : planter des arbres! C'est spontanément qu'il plante petit à petit des anarcadiers (cajou) pour arriver aujourd'hui à 400 plants dans sa parcelle d'un hectare. Associées à ces anacardiers, on trouve une grande variété de plantes : courgettes, pastèques, gombo, concombre antillais, etc. et des jeunes plants d'arbres (cacaoyer, cupuaçu, mangabeira) protégés du soleil grâce à la couverture végétale du maïs et du manioc et des grands palmiers. Dans de telles conditions les arbres se plaisent beaucoup, et les anacardiers commencent déjà à dépasser le maïs !


A l'arrière de sa maison, on trouve poules, cailles, pintades et canards. C'est un goyavier qui fait office de poulailler. Derrière cette basse cour se trouve le jardin, constitué de différentes espèces. Bananiers, Tournesol mexicain, vinaigrier, mumuna, font office de couverture végétale et protègent du soleil et des intempéries les plants de cacao, cupuaçu, oranger, sapotille mais aussi pour les patates douces qui courent le long du sol. Au bout du jardin, c'est une association d'ananas, de maïs et de fruits de la passion... Le maïs produit sert à nourrir ses poules qu'il chérie tant. Quand on vous parlait de diversité !


 

Argemiro


Ce monsieur à l'accent bien aiguisé (tout comme sa faux), a intégré le projet il y a un an en voyant le succès de Barroso. C'est à la suite de la visite réalisée à Tome Açu, chez l'agroforestier Michinori Konagano, qu'il fût conquis par l'idée et rentre les bras remplis de semences et de plants. Il se lance dans la "roça sem fogo" et plante avec frénésie : anacardier, cacaoyer, cupuaçu, açaï, cocotier...


Sa parcelle est située au milieu de "roça com fogo" en cours de reboisement. Après avoir déboisé à la faux il a pris le soin de garder l'arbre natif de la capoiera : le bacuri, qui donne un fruit dont la pulpe est valorisée. Ne pouvant pas faire face à un échec, il a également gardé une parcelle sur brûlis pour y cultiver riz et manioc.


Sa particularité ? Réaliser des couloirs de coupes dans la capoeira pour faire pousser des anacardiers à l'ombre des bacuri.

 

Alexandra


Elle habite seule et travaille seule. Être insérée dans un projet coopératif est donc une aubaine pour elle. D'autant plus que sa situation est plus précaire que les autres puisqu'elle ne possède pas de terre. Elle a dès le début intégré le projet, mais le démarrage est plus compliqué pour elle car le sol qu'elle travaille est épuisé. Elle possède deux parcelles. Sur la première, comme chez Argemiro, elle a gardé les bacuri pour cultiver en dessous manioc, haricots mais aussi cacaoyers, fruits de la passion, bananiers et ananas. Son sol est bien couvert par les restes de taille d'arbres. La deuxième parcelle a été nettoyée par le feu, mais cette année elle va commencer la diversification et la plantation d'arbres.


Chez elle, on insiste sur la fertilisation. On plante beaucoup de légumineuses (feijão do porco, feijão guadu) et des plantes très productives en biomasse (margueritão, vinegra) pour régénérer le sol. Pour donner un petit coup de pouce aux plantations, on apporte de l'urée et des roches phosphatées.


 

Et nous dans tout ça ?

Nous avons rencontré des gens qui avaient besoin d'être accompagnés techniquement. Des gens plein de savoirs mais qui ont besoin d'être rassurés. Des gens dont ont a perçu la satisfaction de travailler avec ce type de système. A leurs côtés, nous en avons beaucoup appris sur leurs différentes cultures et leurs fonctions (bientôt une arvothèque...). Nous avons également mis la main à la pâte et planté haricots, pris soin des jeunes plants en leur apportant des fertilisants, taillé les bananiers qui donnent l'ombre et bien d'autres choses encore !






[1] Agrovilla est le nom donné aux communautés créées pour les familles délocalisées suite à la construction de la base spatiale.

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